Dans un pli de vêtement j'interroge le sens de l'histoire dans une conversation coupée dans une parole dite avant de disparaître en taxi je vois quelque chose venir tous ces moments inachevés tous ces gestes interrompus quelle parole pour les recoudre ?
*
Les mots sont des briseurs de cercle :
parfois, ils sont la chance, et la seule qui nous reste :
encore faut-il savoir les jeter par la fenêtre.
*
Bibliographie
Contre
la guerre, sonnet
Naguère, guerre était violente lumière
sur la vie.
Dans notre aujournuit,
Toute guerre dérive en jour anéanti.
Mais c’est toujours la même guerre :
Maxi contre Mini :
Les bannis, les frères, les pères et
beaux-pères,
Les beaux-frères, les ami@@@s,
Les excellents amis de nos amis.
Que faire contre la guerre ? Avec
l’ennemi ?
Un sage lissage de tout conflit ?
De toute vraie et fausse folie ?
La guerre, vernaculaire, ne guérit rien.
Toute guerre commence par haine de soi.
Toute guerre diffère l’emploi qu’on peut
faire de sa propre vie.
Paris, printemps 1999.
*
Dans la cellule où tourne en vain la vie
Où la chaleur ne cesse d’assiéger la
bouche
Où l’homme prête encore son souci
Au plus mince accident du monde
Dans la cellule où s’évertue la vie
Fièvre sortie de l’aorte comme une lave
Boucherie où l’homme mord son poing
Dans la cellule où le sang féconde
L’énergie de la chance fraternelle
L’homme sans miroir apprend la mort par
cœur
.
Grande barrière muette
Qui ose vous franchir aujourd’hui
On a beau se déchaîner sous le couvert
des vagues
Le cœur n’y est pas
Les mains trop immobiles
On recherche partout les raisons d’une
halte
Les sentiments s’effritent dans le noir
Goutte à goutte
Demain ce sera la hargne rieuse
Nul téléphone ne pourra traverser ce
silence
Le déjeuner du matin perpétuera la
goinfrerie d’un survivant.
.
Qui pense encore, la bouche ouverte
Dans une grande chambre
silencieuse ? Qui marche,
La chemise déboutonnée face à la mer,
Par les derniers chemins du dernier cap,
Le cœur débordant de vin rouge ?
Heureux ?
C’est celui
pour qui ces mots sont écrits en
français,
Lui qui les lit, en attendant, debout, un
train sur le quai.
.
Je ne sais d’où je viens. Je sais
seulement que c’est de partout.
Je suis de nulle part, comme tous les
Terriens.
J’appartiens, comme chacun, à des sacs, à
des ballots incohérents, à la poussière des caravanes.
Depuis des siècles, j’ai marché, erré
dans le même soleil, le même froid général.
Tous, nous sommes les fils des horizons
de l’égalité…
.
Révolté par les absences de révolte, je
suis, depuis toujours, certain d’une invention politique hors saison.
Oui : qui pourrait s’en remettre à la mort pour clarifier les combats de
guerres sempiternelles, ceux qui tuent dans l’anonymat de tous ?
Les exceptions sont des règles refoulées.
Dans l’étroite orbite de l’univers, j’ai catapulté une volonté de tout savoir.
Ni moi ni personne ne peut s’y résigner. Non :
Le temps n’est pas le four où l’espace
serait le feu.
Kingston, 1991
*
Dans le couloir où me suivent les capes
d’hermine
La révolution se prépare à coups de
talons hauts
Un broc lancé à perdre haleine dans une
vitrine
*
Bêtise
dictatoriale de l’homme, assez.
Assez
de sornettes sur vos agapes, prouesses, calembredaines, rixes, gaspillages et
bénéfices.
Assez
d’étiquettes sur vos absences de sexe.
Assez
de frénétiques banalités.
Assez
d’opacité, de transparence tronquée.
La
faux renverse le gouvernement de la mort, et c’est par ricochets qu’elle
décrochera les contre-vérités qui nous tuent.
Les
yeux fixés sur votre plastron, nous aiguiserons la lame jusqu’à la capitulation
de chacun de vos boutons de guêtre, fil compris.
Il
n’y aura pardon pour le crétinisme des Etats que dans l’absolu, c’est-à-dire
jamais.
Le
tranchant succédera à la boursouflure, qui est au sommet, mais par brèches.
Ne
vous fiez donc pas à nous, jamais. Nous sommes détenteurs de mots
ingouvernables.
.
Mille
pardons, messieurs les éternels morts-vivants, critiques énucléés,
génuflecteurs de l’œil et de l’oreille, je n’approuve pas votre
« je », moins encore le « nous » conventionnel que vous
volez à l’assemblée vitupérante des voix distinctes,
Mille
pardons, la vie hèle ce qui se refuse à former les tapis de la prépotence, et
chaque parcelle criante, éjectée par l’ordre carcéral, doit remplacer l’affreux
décor de votre joli monde…
*
Mes
idées tournent, toutes, depuis toujours, autour d’une révolution mondiale sans
modèle, donc sans précédent. Rien, surtout pas mes déboires, n’a pu m’en faire
dévier. Quoi qu’il arrive, quoi qu’il n’arrive pas, rien ne m’en écartera.
.
Le
fait révolutionnaire n’est pas dans l’objet, mais dans le sujet, telle était ma
formule pour couper court à tout. Eclats de rire, insultes, indignation
générale. Inévitable : - Vous êtes donc réactionnaire ? – Oui, dans
le sens où je ne crois plus, pardonnez-moi, ni aux partis politiques, ni aux
syndicats, ni même à la spontanéité des masses. – Ah bon, vous en êtes
là ? – Oui, à peu près, mais je ne parle pas de vous, je parle de ce pays
extraordinairement inconscient de sa propre histoire qu’est la France, vous
connaissez ce pays sans mémoire de lui-même ?
.
L’art de vivre consiste à cesser de se
quereller soi-même sur le parti qu’on a pris et sur le rôle qu’on se donne,
mais le jouer le mieux possible.
*
- Conspiration, récit, éditions nrf Gallimard, L'infini, 2000
- C'est aujourd'hui toujours (1947-1998), éditions nrf Gallimard, 1999
- L'ami Rezvani, Revue Poésie, n°95, 2002
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