mardi 31 janvier 2017

Omar Youssef Souleimane



On dessine des ailes battantes pour saluer le mystère

On chérit le bateau qui fait périr les étrangers

Les racines du ciel sont de bois
et des cloches à l'horizon pleuvent
sur l'éternel recommencement

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Bibliographie



Loin de Damas, éditions Le Temps des Cerises, 2016

dimanche 1 janvier 2017

Samar Yazbek



Ecrire est une voie vers la conscience à travers ses relations complexes avec la mort.C’est une reproduction de la vie, un défi courageux à la mort. Mais aussi une défaite, car, pour finir, la mort, avec toutes ses questions difficiles, représente à la fois l’impulsion de l’écriture et sa source. C’est une défaite courageuse.
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Le monde extérieur ne croira jamais que ce qui se passe en Syrie - ce dont le monde entier est témoin pourtant - n’est rien d’autre que le désir de la communauté internationale d’assurer son propre salut. D’autres gens meurent à la place. La communauté internationale poursuit sa vie alors même que la vie s’éteint devant ses yeux. Ils sont les survivants et cela suffit. C’est un instinct charnel semblable au désir sexuel. Les voyeurs du monde entier prennent leur pied en regardant la lutte désespérée de la Syrie pour survivre, une scène composée essentiellement de tas de cadavres syriens. Le monde se contente de regarder, de broder, de rendre encore plus sensationnel le spectacle artificiel de la guerre entre Assad et l’EI. Puis cet épouvantail a grandi pour devenir le montre effrayant dont ils avaient besoin pour apaiser leur absence de conscience. Ce qui se passe n’est pas nouveau dans l’histoire de l’humanité. Mais cela se déroule à la vue de tous. Le sang se répand sous nos yeux et sur nos mains. Accompagné d’images de barbarie qui font de nous des monstres au coeur froid. La machine médiatique internationale tourne en boucle si bien que chaque nouvelle victime efface la précédente et nous familiarise avec l’atrocité et l’ampleur de la mort. Nous consommons les informations puis nous les jetons à la poubelle.
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Pendant plus de vingt ans, les histoires ont constitué le seul royaume auquel je croyais. Mais j’ai découvert après un an que l’exil est l’exil et rien d’autre. Cela veut dire marcher dans une rue et savoir que vous n’êtes pas à votre place.
Ici, dans mon exil, j’ai appris à marcher et à réfléchir pendant mon sommeil. Endormie ou peut-être déjà morte ? Quelle différence alors que je me sens détachée, absente de la réalité ? J’ai beau tâter mon corps, je ne reconnais pas mes mains. Mon récit me paraît étranger, méconnaissable. Ai-je jamais été à ma place ? Je la trouverai peut-être en plongeant encore plus loin dans mon exil.

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Bibliographie



Les portes du néant, éditions Stock, 2016