mardi 18 octobre 2011

Julien Gracq

La mémoire des livres est une mémoire bourgeonnante, étrangement multipliée parce que chacun de ses éléments est lui-même un petit monde toujours en puissance d'éclosion.

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Tout livre pousse sur d'autres livres, et peut-être que le génie n'est pas autre chose qu'un apport de bactéries particulières, une chimie individuelle délicate, au moyen de laquelle un esprit neuf absorbe, transforme, et finalement restitue sous une forme inédite non pas le monde brut, mais plutôt l'énorme matière littéraire qui préexiste à lui.

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Quand on gouverne, il faut toujours aller au plus pressé, et le plus pressé – à n’y pas croire – c’était toujours cette chose inexistante qui poussait son cri muet, - plus énergique que tous les bruits, parce que c’était comme une voix pure, - qui se taillait d’avance sa place, qui gauchissait tout, cette chose endormie dont le Ville était enceinte, et qui faisait dans le ventre un terrible creux de futur.

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Un Etat ne meurt pas, ce n’est qu’une forme qui se défait. Un faisceau qui se dénoue. Et il vient un moment où ce qui a été lié aspire à se délier, et la forme trop précise à rentrer dans l’indistinction. Et quand l’heure est venue, j’appelle cela une chose désirable et bonne. Cela s’appelle mourir de sa bonne mort.

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Bibliographie

- Familiarité du livre, éditions José Corti, http://www.jose-corti.fr/titresfrançais/gracq-familiarite.html 

- Le rivage des Syrtes, éditions José Corti, 1951

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