dimanche 18 septembre 2011

René Char

La seule signature au bas de la vie blanche, c'est la poésie qui la dessine. Et toujours entre notre cœur éclaté et la cascade apparue.

*


Elle est venue par cette ligne blanche pouvant tout aussi bien signifier l'issue de l'aube que le bougeoir du crépuscule.
Elle passa les grèves machinales; elle passa les cimes éventrée.
Prenaient fin la renonciation à visage de lâche, la sainteté du mensonge, l'alcool du bourreau.
Son verbe ne fut pas aveugle bélier mais la toile où s'inscrivit mon souffle.
D'un pas à ne se mal guider que derrière l'absence, elle est venue, cygne sur la blessure, par cette ligne blanche.

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"Je t'aime", répète le vent à tout ce qu'il fait vivre.
Je t'aime, et tu vis en moi.
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Ah! beauté et vérité fassent que vous soyez présents nombreux aux salves de la délivrance!
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Tu es pressé d'écrire

Comme si tu étais en retard sur la vie.

S'il en est ainsi fais cortège à tes sources. Hâte-toi.

Hâte-toi de transmettre

Ta part de merveilleux de rébellion de bienfaisance.

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Il faisait nuit. Nous nous étions serrés sous le grand chêne de larmes. Le grillon chanta. Comment savait-il, solitaire, que la terre n'allait pas mourir, que nous, les enfants sans clarté, allions bientôt parler?

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Le poète est retourné pour de longues années dans le néant du père. Ne l'appelez pas, vous tous qui l'aimez. S'il vous semble que l'aile de l'hirondelle n'a plus de miroir sur terre, oubliez ce bonheur. Celui qui panifiait la souffrance n'est pas visible dans sa léthargie rougeoyante.

Ah! beauté et vérité fassent que vous soyez présents nombreux aux salves de la délivrance!

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Que les gouttes de pluie soient en toute saison

Les beaux éclairs de l'horizon;

la terre nous la parcourons.

Matin, nous lui baisons le front.

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A chaque effondrement des preuves le poète répond par une salve d’avenir

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Ne t’attarde pas à l’ornière des résultats

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Cette guerre se prolongera au-delà des armistices platoniques. L’implantation des concepts politiques se poursuivra contradictoirement, dans les convulsions et sous le couvert d’une hypocrisie sûre de ses droits. Ne souriez pas. Ecartez le scepticisme et la résignation, et préparez votre âme mortelle en vue d’affronter intra-muros des démons glacés analogues aux génies microbiens.

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Un homme sans défauts est une montagne sans crevasses. Il ne m’intéresse pas.

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A tous les repas pris en commun, nous invitons la liberté à s’asseoir. La place demeure vide mais le couvert reste mis.

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Bibliographie

-- Le marteau sans maître, nrf Poésie/Gallimard, 2002
-- Recherche de la base et du sommet, nrf Poésie/Gallimard, 1986
-- Commune présence, nrf Poésie/Gallimard, 2003
-- Dans l'atelier du poète, Quarto Gallimard, 1996
Fureur et mystère, nrf Poésie/Gallimard, 1967


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