samedi 25 février 2012

Henri Atlan

Savoir qu’on est ignorant est déjà un premier pas sur la voie se la connaissance. 

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Grâce au calcul différentiel, la plénitude du tout se retrouve en chaque partie si petite soit-elle. Et cette rationalisation de chaque partie, ou de chaque état d’un processus, qui résulte de la loi de la totalité présente en chaque point pas le biais de sa différentielle, est dans son principe une propriété à la fois physique et cognitive. Elle concerne aussi bien les choses comme états de la substance que les états de la conscience qui les connaît. C’est pourquoi « un état de conscience n’est au fond qu’une différentielle de la conscience, et si la conscience c’est tout l’univers en raccourci, un état de conscience, c’est toute la conscience en raccourci ».

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Quand deux individus se rencontrent, même s’ils en profitent pour régler leurs affaires et même si cette rencontre est le résultat de causes efficientes et matérielles évidentes, elle reste quand même fortuite si elle ne résulte pas d’une cause finale sous la forme par exemple du désir d’au moins l’un des partenaires de provoquer cette rencontre.

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Tout évènement ne peut survenir que s’il a une cause efficiente et, pour en rendre raison, il suffit de connaître cette cause. Ce principe s’est diversifié depuis lors en ce que la cause peut être remplacée par un en semble de causes, et surtout par une loi causale dont la généralité et l’abstraction sont plus grandes que l’effet qu’elle produit et qu’elle explique.

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C’est le statut de tout évènement naturel, non produit par la planification et l’art humains, que d’être dépourvu de finalité, dans notre monde déterminé par des lois physiques où les causes finales n’ont plus de place.

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L’aléatoire moderne est ce qui se produit sans cause connue, ni même connaissable, et dont la survenue singulière ne peut donc être prédite.

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Pour un être pensant, renoncer à l’effort de rendre les choses intelligibles est ni plus ni moins que renoncer à vivre, si tant est que l’esprit et le corps soient une seule et même chose, et que la vie de l’un soit la vie de l’autre.

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L’invocation  du hasard comme ignorance des causes, et reconnaissance de l’impossibilité de choisir en connaissance de cause, est une ouverture par rapport à l’enfermement dans un sens préfabriqué ou dans un désir de rationalisation à tout prix. L’illusion impatiente d’un savoir accompli est au moins aussi dangereuse que l’arbitraire des illuminations et de leurs interprétations.

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L’arbitraire du hasard peut être préférable à l’arbitraire d’un choix.


L’ignorance reconnue est préférable au faux savoir.

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L’athéisme est préférable à l’idolâtrie.

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Toute pensée émet un Coup de Dés.

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L’existence ou non d’un sens des évènements naturels dépend du comportement des hommes par rapport à la nature et de leur faculté de domestiquer le hasard, c’est-à-dire de lui donner un sens. Si les hommes vont au hasard dans la nature, c’est-à-dire s’ils ne donnent aucun sens à leur existence, alors en effet il n’y a aucun sens.

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L'idée classique selon laquelle il ne pourrait y avoir de responsabilité morale que de ce que nous avons choisi librement est fausse : nous sommes responsables de beaucoup de choses que nous n'avons pas choisies. Il est important d'assumer cela et de vaincre cette idée selon laquelle s'il n'y a pas de libre arbitre, il n'y a pas de responsabilité et donc pas d'éthique.

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On ne peut être inhumain que si l'on est un être humain. Le degré d'humanité ou d'inhumanité est amplifié par la technique mais l'humanité reste la même.

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L'évolution culturelle va beaucoup plus vite que l'évolution biologique.

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Bibliographie

- Philosophie Magazine n°50, juin 2011

- Les étincelles de hasard Tome 1. Connaissance spermatique, éditions du Seuil, La librairie du XXè siècle, 1999

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