dimanche 24 mars 2013

Giacomo Rizzolatti & Corrado Sinigaglia


La thèse, autrefois largement partagée, et reprise parfois encore aujourd’hui, selon laquelle les fonctions sensorielles, perceptives et motrices seraient la prérogative exclusive de certaines aires séparées entre elles, semble être le fruit d’une simplification excessive. En particulier, il est de plus en plus évident que le système moteur possède une telle multiplicité de structures et de fonctions qu’on ne peut plus le confiner au rôle de simple exécuteur passif de commandes ayant leur origine ailleurs.

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Partager, au niveau viscéro-moteur, l’état émotionnel de quelqu’un ne signifie pas cependant être en empathie avec lui. Par exemple, si nous percevons une grimace de douleur, ce n’est pas pour autant que nous sommes amenés automatiquement à éprouver de la compassion. Certes, cela arrive souvent, mais ces deux processus sont distincts, au sens où le second implique le premier, mais non l’inverse. Outre la reconnaissance de la souffrance, la compassion dépend de bien d’autres facteurs, comme par exemple de notre connaissance de l’autre, des relations que nous entretenons avec lui, de notre capacité à nous identifier à lui, de notre désir d’endosser sa situation émotionnelle, de ses désirs, de ses attentes, etc. Si c’est quelqu’un que nous connaissons ou qui ne nous inspire aucun sentiment négatif, la résonance émotionnelle provoquée par la vue de sa souffrance peut nous inspirer de la compassion ou de la pitié ; mais les choses peuvent se passer tout autrement si cet individu est notre ennemi ou bien si, dans une situation donnée, il est en train de commettre un acte qui représente pour nous un danger potentiel ; il se peut aussi que nous soyons profondément sadiques, et que la souffrance des autres nous procure du plaisir, etc. Dans chacune de ces situations, nous percevons immédiatement la douleur d’autrui, mais cette perception n’induit pas nécessairement chaque fois une coparticipation empathique.

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L’étude du système moteur nous avait orientés vers une analyse neurophysiologique de l’action capable d’identifier les circuits neuraux qui régissent nos rapports avec les objets. La mise en lumière de la nature et de la portée du mécanisme des neurones miroirs semble, à présent, nous offrir une base unitaire à partir de laquelle nous pouvons commencer à comprendre les processus cérébraux responsables de cette riche palette de comportements qui scandent notre existence, et dans laquelle prend corps le réseau de nos relations interindividuelles et sociales.

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Bibliographie

Les neurones miroirs, éditions Odile Jacob, 2008

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Sur internet



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