samedi 17 janvier 2015

Il est temps de rompre

A propos de « Matin brun », de Franck Pavloff

Il est temps de rompre, oui. Rompre avec les indifférences, avec les petits accommodements.

Il est temps de rompre.

1997 fut un temps de montée brune. Des mairies passées à l'affront faisaient figure de proue des petits arrangements politiciens avec la peste. L'art et la manière de réactiver les schémas les plus odieux tout en se réclamant parfois de gauche.
Spectre si dangereux à manipuler qu'il se retourne toujours contre ceux qui l'emploient.



En 1998, parraissait « Matin brun » de Franck Pavloff.
Nous avons tout fait pour qu'il soit lu. Il a été lu, mais bien vite oublié.

En 2002, il devint évident que la manipulation des apprentis sorciers de la politique nationale imprimait aux cervelles désorientées d'un peuple sans cesse trahi (par ceux qu'il prenait pour les siens) une monochromie rance dont les ramifications ne pouvaient que croître au terreau fertile de médias offerts aux puissances financières.
On manifesta, bien sûr, et « Matin brun », de Franck Pavloff ressurgit comme un miracle prémonitoire.
Le danger ne fut écarté que de justesse et par la défaite de toutes les espérances.
Pas un mot pour celles et ceux qui avaient fait barrage, mais toujours les mêmes mirages dressés d'une crise qui détruit tout le monde, qui détruit le monde, mais profite toujours aux mêmes.
Mêmes vieilles ficelles tirées en haut lieu, sur terreau de destruction de tout ce que ce pays pouvait encore porter d'éducation et de culture.

Voilà que le mufle brun, féminisé pour mieux se fondre au lisier ambiant, se trouve dépassé par ceux mêmes qu'il ne cessa de stigmatiser.
Le cocktail de la misère, de l'ignorance et du fanatisme fondé sur des amalgames confus ont désormais généré ce qu'il convient de nommer un nazisme fondamentaliste religieux.
On le trouve dans toutes les religions, mais bien sûr, on vous dira que les pires sont islamistes.
On ne vous dira jamais qu'en haut lieu, ceux qui enfoncent le pays dans une crise sans fondement, supercherie suprême jetée aux esprits effondrés par une inculture généralisée, au nom des dogmes de l'école du chaos et du choc, en tirent les ficelles.



Et « Matin brun », de Franck Pavloff ressurgit, illustré cette fois.
Mais sera-t-il lu autant que Voltaire en ces temps de trouble évident, et par qui ?

Il serait temps de rompre avec les feux de paille de nos petites révoltes émotionnelles.
Il serait temps de démasquer celles et ceux qui depuis plus de quarante ans jouent avec les allumettes pour mieux crier au feu et s'autoproclamer démocrate quand ils ne cessent, au nom des risques terroristes, de prendre mesures contraignantes pour nos libertés.
Il serait temps de lire « Matin brun » de Franck Pavloff, non pour s'en faire un viatique, mais pour nous détourner des sentiers boueux où nous conduisent les basses manœuvres politiciennes et l'absence de vraie politique d'éducation et de culture à la hauteur des nécessités, en invitant celles et ceux qui depuis trente ans plongent la main au portefeuille des plus pauvres pour engraisser le leur, sans aucune considération pour la désolation qu'ils sèment.
Et si ce sont des journalistes, écrivains, poètes, dessinateurs qui ont trouvé la mort sur ce chemin d'abjection, considérons enfin le message symptomatique qui nous est envoyé : lisons, relisons et faisons lire « Matin brun » de Franck Pavloff, puisqu'il nous invite à quitter les routes toutes tracées des pensées d'experts assermentés au CAC 40.

Il est temps de rompre.
"Ni couleur imposée ni pensée unique, nos matins seront libres", nous dit Franck Pavloff.


© Xavier Lainé, 18 janvier 2014

Bibliographie

Matin brun, éditions Cheyne, 1998

Matin brun, éditions Albin Michel, 2014


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