Je vous écris de mon
silence et vous n'en saurez rien, puisque mes mots tombent sans
bruit.
Je vous écris de ma marge, où les mots sont de peu d'importance car ils ne brilleront jamais sur les scènes où vous allez pérorer comme chaque année.
Je vous écris de ma marge, où les mots sont de peu d'importance car ils ne brilleront jamais sur les scènes où vous allez pérorer comme chaque année.
Mes mots ne joueront
jamais dans la cour des grands, et disant cela je ne joue pas au
martyr. Car je ne vous envie pas : votre calvaire médiatique
m'est une plaie ouverte. Je vise pour les mots autre chose que cet
enfer où vous circulez, adulés.
Je vous écris donc de
mon silence.
Plus assez d'argent pour
acheter et lire tout ce que vous écrivez et qui trouve grâce aux
yeux des financiers du livre.
Votre parade annuelle
n'est qu'un masque : il faut faire fonctionner la « filière »,
écrire n'est que fumée sur cet écran où se projettent d'autres
rêves.
Je dois bien constater
que pour beaucoup le rêve ne sera jamais contenu dans un livre. Il
se réduit, toujours plus, à cet écran plat où se déchaînent des
idées sans relief.
Je suis dur, c'est vrai.
Je suis dur, non par
jalousie ou frustration, mais parce que ce monde là fourmille de
donneurs de leçons et ne dit jamais ce qu'il est réellement.
Combien de livres écrits
pour répondre à la sollicitation des éditeurs eux-mêmes ?
Combien d'écrivains qui
gagnent vraiment leur vie en cultivant leur art ?
L'audimat fait-il le
professionnel de la littérature, indépendamment de la littérature
elle-même ?
Je suis dur, c'est vrai.
Je pourrais d'ailleurs
poser les mêmes questions dans presque tous les métiers :
quelles chances ont les talents aujourd'hui ?
Aucune, car il faut être
du côté du manche dès lors que tout est verrouillé par ces gens
bien placés selon leur porte-feuille et qui entendent dominer le
monde au service des planqués de la finance.
Dès lors comment sortir
de l'ornière et faire des exceptions une généralité. Car en ce
système où le talent ne suffit, où il faut en plus avoir le culot
de faire valoir son œuvre, de faire le siège des éditeurs jusqu'à
trouver celui qui sera le bon, et donc avoir les moyens de ces
assauts, fort peu peuvent encore se faire valoir d'humilité.
Et il leur est demandé
(L'Harmattan n'est pas le seul dans ce cas) d'être les VRP de leur
production littéraire...
Les correspondances sont
la vitrine de ce monde là. Rares sont ceux qui peuvent s'y retrouver
et leur public est un peu toujours le même d'une année à l'autre :
catégories moyennes plutôt âgées, ayant encore des revenus
permettant ce « tourisme culturel ».
Les autochtones, dans
leur grande majorité, continueront à bosser comme si de rien
n'était. Certains se contenteront de rêver pouvoir enfin profiter
de cette manne littéraire servie à domicile et resteront chez eux,
frustrés de n'avoir pu s'offrir ces mets de choix.
Car, malgré toute mes
préventions, il n'est pas que brouet servi en ces jours de
littérature spectacle. Et bien peu en seront les élus.
23 septembre 2015
Xavier Lainé
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