Toute
information sale, trop proche de la terre, de la vie ou du corps est
dévalorisée.
Ce
qui vient de l’empirisme est systématiquement marginalisé parce que nous
évoluons dans une société où la technique règne sans partage. Ce qui vient de
l’extérieur est considéré comme un symptôme qu’il convient d’écraser. Celui qui
dirait qu’il est angoissé pour des raisons climatiques ou des processus sociaux
pourtant bel et bien vecteurs d’angoisses, passerait pour fou. Il y a là un
réductionnisme très dangereux. Ecraser les symptômes est la pire chose que l’on
puisse faire.
*
On
prête aux ordinateurs la capacité de voir le tout, alors que l’être humain ne
voit que la partie. La conséquence insidieuse de cette conviction réside dans
la perte par l’être humain de son savoir, même partiel. La normalisation de la
population sérialise et quadrille l’individu, si bien qu’il perd la confiance
dans ses propres sens.
*
Aujourd’hui,
pour comprendre certains processus physiologiques, il faut se détacher du tout
génétique – une posture trop idéologique – pour adopter une compréhension plus
complexe, épigénétique.
*
Qui
se guide par la représentation met sa vie en danger. Qui s’informe abondamment
risque de trébucher sur le tronc d’arbre qui est à ses pieds. Qui guide sa vie,
un village ou un pays en fonctions d’informations déterritorialisées met sa vie
en péril.
*
Comment
cohabiter dans une société du savoir, de la science, de la rationalité ?
Comment réintroduire le non-savoir en amitié avec le savoir ?
Si
nous ne sommes pas capables de cela, l’irrationnel fanatique et religieux va
l’emporter. Le rationalisme qui croit que toute la complexité est transparente
se conforte dans l’échec et l’obscurantisme rebondit sur cet échec-là.
*
On
comprend d’où vient en partie l’impuissance d’une population : si les gens
dépendent de l’information centralisée, codifiée, ils ne peuvent rien.
L’information tellurique, non codée, est une information qui a besoin d’un
contexte dans lequel des liens sont tissés. Par opposition, l’information codée
s’adresse à des individus sérialisés, isolés dans une grotte, s’informant de
quelque chose qu’ils appellent le monde.
*
-
Avec Angélique del Rey, Eloge du conflit, éditions La
découverte, 2007 , voir : http://lesnourritureslivresques.blogspot.fr/2011/09/angelique-del-rey-miguel-benasayag.html
-
Regards, n° 12, été 2011
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Qui que vous soyez, vous êtes le bienvenu, avec vos commentaires qui sont modérés. Il vous faudra attendre avec patience leur modération pour les voir apparaître au bas de chaque article. Merci de votre compréhension