Il tenait à la main une valise pleine de
linge et dans l’autre une valise identique renfermant les quelques deux mille
lettres qu’elle lui avait écrites. Elles étaient classées selon leur date de
réception, en liasses ficelées avec des rubans de couleur. Et aucune n’était
ouverte.
.
Les coqs de l’aube nous surprenaient en train d’essayer de reconstituer la chaîne
des nombreux hasards qui avaient rendu l’absurde possible ; et il était
évident que nous n’agissions pas par simple désir de percer le mystère, mais
parce que personne parmi nous ne pouvait continuer à vivre sans savoir exactement
la place et la mission que la fatalité lui avait assignées.
*
Macondo était alors un village d’une
vingtaine de maisons en glaise et en roseaux, construites au bord d’une rivière
dont les eaux diaphanes roulaient sur un lit de pierres polies, blanches,
énormes comme des œufs préhistoriques. Le monde était si récent que beaucoup de
choses n’avaient pas encore de nom et, pour les mentionner, il fallait les
montrer du doigt. Tous les ans, au mois de mars, une famille de gitans
déguenillés plantait sa tente près du village et, dans un grand tintamarre de
fifres et de tambourins, faisait part des nouvelles inventions.
*
Bibliographie
- Chronique d’une mort annoncée, éditions Grasset/ le livre de poche, 1981
- Cent
ans de solitude,
éditions du Seuil/ Points, 1995
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Qui que vous soyez, vous êtes le bienvenu, avec vos commentaires qui sont modérés. Il vous faudra attendre avec patience leur modération pour les voir apparaître au bas de chaque article. Merci de votre compréhension