Ecrire
sur le passé n’est pas la même chose que d’y penser puisque, si l’on ne peut
écrire sans penser, l’inverse est évidemment possible, et je crains de le faire
trop souvent. Confrontée à l’écriture, je dois, bien sûr, plonger dans ce puits
profond creusé au fond de l’être, dans ce lac obscur d’une nébuleuse contrée.
On cherche des reflets et, comme Narcisse, on ne trouve généralement que le
sien, qui vous regarde avec une expression à peine reconnaissable et vous fait
signe, depuis les profondeurs, distordu par le passage du temps.
.
Pour
moi, qui suis l’une de ses enfants, Bloomsbury a deux cœurs, battant en accord
ou en opposition. L’un est le cœur littéraire, l’autre celui des peintres, dont
j’étais le plus proche. Plus calme, moins tumultueux, il était aussi moins
identifiable, et il est donc moins connu.
.
Si
j’ai pu voir la France en victime, je ne l’ai jamais crue vaincue. La situation
avait inévitablement, désastreusement changé, mais le conservatisme des
français avait extraordinairement réussi à préserver les traditions
provinciales : villes et villages semblaient avoir un mode de vie beaucoup
plus flaubertien ou balzacien qu’anglais ou américain.
*
Bibliographie
- Les
deux cœurs de Bloomsbury, éditions Le Promeneur, 2001
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